Introduction
Le 15 avril 2013, la direction a présenté ses propositions budgétaires aux membres du conseil d’administration.
D’entrée de jeu, signalons que les compressions de dépenses du fonds de fonctionnement[1] s’élèvent à 1,572 M$ en comparaison du budget révisé de 2012-2013 qui comportait lui-même des compressions de 1,4 M$. Au chapitre des revenus, c’est une hausse de 3,134 M$ qui est enregistrée.
Résultats budgétaires (en milliers de dollars)
Budget révisé
2012-2013 |
Budget initial
2013-2014 |
Écart | |
Revenus | 69 340,4 $ | 72 474,8 $ | 3 134,4 $ |
Dépenses | 72 563,5 $ | 74 135,9 $ | 1 572,4 $ |
Écart | – 3 223,1 $ | -1 661,1 $ | 1 562,0 $ |
Source : « Présentation du budget 2014-2014 au conseil d’administration de l’UQO, 15 avril 2013 »
La présentation des documents budgétaires
Nous notons d’abord qu’il est impossible d’identifier les impacts réels des compressions des dépenses à partir de la documentation transmise aux membres du conseil d’administration puisque la direction a privilégié un mode de présentation par type de revenus (droits de scolarité, subventions, entreprises auxiliaires, etc.) et par nature de dépenses (salaires, fournitures et matériel, etc.) pour illustrer la variation entre le budget 2013-2014 et le budget révisé de 2012-2013. Un rapport détaillé des compressions par unité administrative (départements, modules, décanat, services administratifs) aurait été essentiel pour permettre aux membres du conseil d’administration de comprendre les orientations réelles de la direction et apprécier la capacité de l’Université à réaliser ses engagements dont celui de soutenir la cause de l’enseignement supérieur en Outaouais et le développement des activités d’enseignement et de recherche au campus de Saint-Jérôme.
Signalons que les membres du conseil d’administration de l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC) ont eu droit à un document de 42 pages qui présente les budgets détaillés de chacune des unités administratives (budget 2012-2013; budget 2013-2014; variations pour chacun des postes de dépenses) : si les compressions effectuées à l’UQAC ne sont pas plus réjouissantes, elles ont au moins le mérite d’être claires.
Séance tenante, nous avons toutefois appris que la hausse des effectifs étudiants pour 2013-2014 a été estimée à 7,6 %, mais que les crédits budgétaires attribués à l’enseignement n’augmentaient que de 3,4 % (45,993 M$ en 2012-2013 à 47,535 M$ en 2013-2014) et que ceux consentis à la recherche diminuaient de 46 % (423 400 $ en 2012-2013 à 227 400 $ en 2013-2014). Rappelons que les pourcentages de variations sont établis sur la base du budget révisé de 2012-2013 qui comportait déjà un effort de réduction sans précédent.
La vitesse de la résorption des compressions
Dans l’ensemble, sur une période de deux ans, ce sont donc des compressions de plus de 5,828 M$ (3,893 M$ en 2012-13, soit la compression de 1,935 M $ annoncée par le MERST et une « perte liée aux événements du printemps » évaluée à 1,958 M$; 1,935 M$ en 2013-2014) que la direction de l’UQO aura fait subir à une communauté déjà fortement sollicitée. Rappelons que le ratio EETP/professeur de l’UQO est plus élevé que dans les autres constituantes du réseau (exception faite de l’UQAM) et que les personnels de soutien et professionnel accusent aussi des retards au chapitre de la dotation.
Plus inquiétante encore est cette décision de la direction de résorber à vive allure les compressions lorsque l’on considère que le gouvernement a consenti des mesures d’étalement des efforts budgétaires sur 9 ans. Dans un document intitulé « Le mesures proposées pour atténuer l’effort budgétaire demandé aux universités », le gouvernement demande aux universités d’avoir résorbé, au 30 avril 2014, 50 % des compressions de 2012-2013 et il autorise d’étaler l’autre 50 % jusqu’en 2018-2019. Quant à la compression de 2013-2014, le gouvernement offre la possibilité de l’étaler jusqu’en 2020-2021.
Tableau comparatif de l’étalement permis et du choix effectué (en millions de dollars)
2012-2013 | 2013-2014 | 2014-2015 | 2015-2016 | 2016-2017 | 2017-2018 | 2018-2019 | 2019-2020 | 2020-2021 | TOTAL | |
Compressions et perte | 3 893 | 1 935 | 5 828 | |||||||
Étalement autorisé | 0 | 1947 | 507 | 539 | 625 | 703 | 733 | 387 | 387 | 5828 |
Étalement choisi par la direction | 2 759 | 274 | 349 | 367 | 424 | 482 | 509 | 332 | 332 | 5 828 |
Source : « Présentation du budget 2014-2014 au conseil d’administration de l’UQO, 15 avril 2013 »
Ainsi, comme l’indique le tableau ci-dessus, la direction avait la possibilité de ne faire aucune compression en 2012-2013 et de limiter l’effort cumulé à 1,947 M$ en 2013-2014. Au lieu, la direction a choisi de comprimer les dépenses de 2,759 M$ en 2012-2013, de demander un effort additionnel de 274 000 $ en 2013-2014 $, avant de réduire la cadence de la récupération qui s’échelonne jusqu’en 2020-2021. Comment l’UQO, qui fait face au défi de consolider sa programmation (l’une des orientations budgétaires adoptées le 10 décembre 2012), peut-elle se permettre des choix budgétaires aussi drastiques ?
Le refus de ramener au fond de fonctionnement les montants virés au fonds d’immobilisations et de réviser des engagements coûteux
Les choix budgétaires sont d’autant plus contestables lorsque l’on considère que les universités ont, exceptionnellement cette année, l’autorisation du gouvernement de ramener au fonds de fonctionnement les montants virés au fonds d’immobilisations au cours des dernières années. Rappelons que les travaux du comité sur le financement universitaire de la Fédération québécoise des professeures et professeurs d’université (FQPPU) ont révélé un phénomène récurrent et répandu de transfert de fonds de fonctionnement pour financer les immobilisations dans les universités, phénomène qui « compromet la mission fondamentale de l’université »[2]. Pour l’UQO, ces transferts, qui s’élevaient à 1,2 M$ en 1997-1998 ont augmenté d’année en année pour atteindre plus de 2 M$ par an, avec pour résultat que le fonds d’immobilisations enregistre, année après année, des excédents des produits sur les charges[3], tandis que des compressions sont subies du coté de l’enseignement de la recherche.
Enfin, s’ajoute le refus de discuter des frais de gestion versés à la Corporation des services universitaires de l’Outaouais et des Laurentides ou de renégocier les contrats de location de l’ENAP et du Collège Nouvelles Frontières qui coûtent plus que ce qu’ils ne rapportent…
Conclusion
Si toutes les universités du Québec doivent composer avec un régime d’austérité imposé par le gouvernement, il y a lieu de se demander pourquoi la direction de l’UQO a choisi de présenter un budget aussi sévère.
[1] L’analyse porte exclusivement sur les données relatives au budget du fonds de fonctionnement.
[2] Suivre ce lien pour consulter le communiqué de la FQPPU : http://www.fqppu.org/assets/files/bibliotheque/prises_de_position/communiques/2013/rapport_fqppu_%20FQPPU_immo_%202013.pdf
[3] Suivre ce lien pour consulter le rapport sur les fonds d’immobilisations: http://www.fqppu.org